C'est la fin de la sixième année de James et Lily à Poudlard. Les Maraudeurs vont en balade, et tout le monde est invité ! Mais Lily a choisi de ne pas partir, ne supportant plus la présence de James Potter...
Avec les paroles de « Il y a trop de gens qui t’aiment », de Hélène Ségara. A l’exception de Claire, les noms de personnages et de lieux ont été imaginés par et appartiennent à J. K. Rowling.Il y a trop de gens qui t'aiment
Poudlard, samedi 18 juin 1977. – Lily ! Lily, qu’est-ce que tu attends ?
Lily Evans regarda son amie Claire qui l’appelait depuis la pelouse devant la porte du château et eut un petit sourire à la vue de sa tenue. Elle s’était habillée spécialement pour l’occasion, avait relevé ses cheveux noirs dans un arrangement soigneusement élaboré pour paraître décoiffée, arborait son nouveau petit sac en cuir de dragon rose – la toute dernière mode, si on en croyait Sorcière Hebdo – qu’elle avait acheté sur le chemin de Traverse pendant les vacances de Noël, et attendait impatiemment Lily, un radieux sourire aux lèvres. Mais la jeune fille secoua sa tête rousse et répondit :
– Vas-y sans moi. Je n’ai pas très envie de sortir.
– Quoi ?
En trois enjambées, Claire rejoignit son amie dans le hall, la prit par le bras et la poussa de force dehors.
– Tu es tombée sur la tête ou quoi, Lily ? Regarde-moi ce soleil magnifique ! Admire ce ciel bleu dépourvu du moindre nuage ! Sens-moi un peu le parfum de l’été ! C’est le dernier week-end à Pré-au-Lard de l’année, tu ne comptes tout de même pas me faire croire que tu vas rester à Poudlard ?
– Je n’ai jamais dit ça, répliqua la jeune fille. J’ira sûrement, mais je n’ai aucune envie d’y aller ce matin avec ces deux prétentieux et leur bande de fans hystériques collées à leurs basques.
Claire fronça les sourcils.
– Alors, c’est donc ça ? Mais j’espère que tu ne m’inclus pas dans le groupe des « fans hystériques » au moins ?
Lily eut un sourire indulgent.
– A peine, murmura-t-elle, un lueur malicieuse dans ses yeux verts.
– Oh ! s’offusqua son amie.
Puis elle reprit :
– Je ne vois vraiment pas pourquoi. D’accord, je trouve Sirius particulièrement mignon et séduisant, et d’accord, James n’est pas mal du tout non plus, et il a fière allure sur son tout nouveau Brossdur 3, et puis ils ont tous les deux un tel sens de l’humour, et…
Elle surprit le regard ironique de son amie et s’interrompit.
– Enfin, bref, d’accord, je les aime bien, mais je ne suis pas la seule, toutes les filles pensent la même chose. Ou presque toutes, ajouta-t-elle en regardant Lily. Dis-moi, mon chou, tu ne vas quand même pas te priver de la plus belle sortie de l’année organisée par les Maraudeurs en personne, sous prétexte que Sirius et James te tapent sur les nerfs ? En plus, ils ont dit que toutes les filles auront droit à des Bièraubeurres gratuites, payées d’avance par eux-mêmes à Mme Rosemerta. Un invitation pareille, ça ne se refuse pas. Et surtout pas toi.
– Moi ? releva Lily.
– Oui, toi. Et tu sais très bien pourquoi.
Le visage de la jeune fille s’assombrit.
– Je ne vois absolument pas de quoi tu parles, Claire.
Son amie la regarda un moment en silence, essayant de déchiffrer son expression. Puis elle reprit plus doucement :
– Mais si, tu le sais. Mais puisque tu refuses de l’admettre, je vais te rappeler de quoi il s’agit : James est follement amoureux de toi.
– Ca, c’est toi qui le dis. Mais je n’en crois pas un mot.
– Dis toute suite que je suis une menteuse ! s’exclama Claire, vexée.
– Je n’ai pas dit ça, répliqua son amie irritée. Je pense simplement que tu te fais avoir, comme tous ceux qui s’imaginent que James est amoureux de moi. Il ne l’a jamais été, et il ne le sera jamais. Il ne sait même pas ce que ce mot veut dire.
Sa voix avait pris une intonation triste et un peu lointaine, mais Claire était trop préoccupée par son idée pour s’en rendre compte.
– Alors, tu pourrais m’expliquer pourquoi il essaie désespérément depuis deux ans de sortir avec toi ? Tu es la fille la plus chanceuse de tout Poudlard et tu ne t’en rends même pas compte.
– Je ne suis pas chanceuse, répondit calmement Lily, et la seule raison pour laquelle James veut tellement sortir avec moi, c’est qu’il a toujours désiré ce qu’il ne pouvait pas avoir. A eux deux, Sirius et lui sont sortis avec presque toutes les filles pas trop moches de l’école. Il veut probablement compléter la collection, et ça l’énerve que je lui résiste. Il n’en a pas l’habitude. Claire, James ne m’aime pas, il me désire, et c’est deux choses différentes.
La jeune brune la regardait, bouche bée. Puis elle se ressaisit.
– Dis ce que tu veux, Lily, mais tu ne me feras pas changer d’avis, déclara-t-elle. James t’aime. Et toi aussi, tu l’aimes. Non, ne dis rien ! Je suis sûre de ce que je dis et je n’en démordrai pas. J’espère seulement que le jour où tu te rendras compte qu’il est réellement amoureux de toi, il ne sera pas déjà trop tard.
Son amie ne répondit pas. Elle s’était appuyée contre le mur du château, à côté de la porte, et elle avait les yeux fixés sur le lac qui miroitait au soleil, près de la forêt interdite. Au bout d’un long moment, Claire reprit la parole.
– Tu es sûre que tu ne veux pas venir, Lily ?
Celle-ci hocha la tête en silence.
– Bon, alors j’y vais, sinon je vais être en retard. On doit se retrouver près du Saule Cogneur pour partir tous ensemble. Si jamais tu as envie de nous rejoindre…
Elle regarda une dernière fois son amie qui n’avait pas quitté le lac des yeux et conclut :
– A plus tard.
Puis elle ajusta son sac sur son épaule et s’en alla.
Le temps était superbe, et Lily comprenait que Claire ait envie de sortir. Elle-même l’aurait sûrement fait sans hésiter si elle n’avait pas répugné à se retrouver en la compagnie de James. Car c’était bien lui le problème. Elle savait qu’il ne la laisserait pas en paix et qu’il emploierait toute son énergie à essayer une nouvelle fois de la convaincre d’accepter son invitation. Depuis deux ans, c’était ainsi, et elle le supportait de plus en plus mal. Pas seulement parce qu’il l’ennuyait, mais aussi parce qu’une partie d’elle-même n’aspirait qu’à une chose : lui dire oui. Mais elle refusait de se laisser aller. Quoi que dise Claire, elle savait que James ne l’aimait pas et ne l’aimerait jamais. Si elle acceptait de sortir avec lui, il serait aux anges pendant quelques jours, comme un gamin à qui on vient d’offrir un nouveau jouet, puis il se lasserait d’elle et la laisserait tomber comme il l’avait fait avec toutes ses conquêtes.
« Je ne subirai pas cette humiliation, songea-t-elle avec colère. Je ne me laisserai pas faire. »
Mais en même temps, la tristesse et le désespoir s’emparaient d’elle. Elle se dit qu’elle avait besoin de se changer les idées. Elle alla chercher un livre dans sa chambre et ressortit dans le parc. Elle ne voulait pas aller à Pré-au-Lard avec les autres, mais cela ne l’empêchait pas de profiter du bon temps. Elle marcha jusqu’à « son » arbre, un grand orme qui trônait sur ce qui ressemblait à une petite colline, et s’assit entre ses racines pour lire. Pourtant, elle n’ouvrit pas son livre tout de suite. Elle aimait particulièrement cette place car c’était un poste d’observation idéal : un peu surélevé, d’où on pouvait voir presque tout le parc de Poudlard jusqu’à la forêt. Elle n’en avait pas eu l’intention au départ, mais à présent qu’elle y était, elle ne pouvait s’empêcher de regarder en direction du Saule Cogneur, là où Claire lui avait dit que les élèves de sixième année et quelques autres devaient se retrouver pour aller à Pré-au-Lard ensemble.
Ils étaient bien là : elle pouvait apercevoir Sirius, avec ses cheveux longs, Remus, un livre sous le bras comme à son habitude, Peter, recroquevillé dans un coin d’ombre, sans doute pour se rafraîchir par cette chaleur, plusieurs autres élèves de sa classe dont Claire qui venait visiblement d’arriver… et bien sûr James. Aussitôt qu’il vit Claire, il s’avança vers elle pour lui parler. Ils échangèrent quelques mots puis il haussa les épaules.
« Il doit se demander où je suis », pensa soudain Lily.
Elle eut un petit rire amer.
« Non, je ne suis pas là aujourd’hui. Désolée, Cornedrue. Tu devras faire avec… »
Elle n’était pas venue là pour ça, mais elle ne pouvait s’empêcher de le regarder de loin. Lui ne pouvait pas la voir, mais elle le voyait, et elle s’abandonnait à sa mélancolie.
Je te regarde parler avec les gens
Tu me semble si léger, même transparent
Je regarde passer les jours, la vie en me disant
Je ne cherche pas l’amour, je m’y attends… Pourquoi était-il toujours ainsi ? Pourquoi ne semblait-il jamais pouvoir s’attacher à quelque chose de sérieux ? Il était là, au milieu de ce groupe, à rire aux éclats à des blagues stupides et à se croire intéressant… Pourquoi était-elle amoureuse de lui ? Elle serait morte plutôt que de l’avouer, mais en réalité elle était comme toutes les autres : elle ne pouvait échapper à son charme. Elle n’aurait d’ailleurs pas pu l’expliquer, mais c’était ainsi. Il avait quelque chose, même s’il n’était pas aussi beau que Sirius, mais il avait quelque chose contre quoi elle ne pouvait pas lutter. Claire prétendait qu’il l’aimait. Elle aurait tellement voulu y croire…
Et pourtant, il était si puéril, rien ne pouvait être sérieux avec lui. Il se moquait de tout. Si seulement il pouvait grandir… Ne serait-ce qu’un peu…
A présent, elle pouvait apercevoir Sirius en train de conter fleurette à une jeune fille de Serdaigle. James se mêla à la conversation qui finit bientôt elle aussi en éclats de rires. La jeune fille s’échappa et alla rejoindre un groupe de ses amies qui se mirent à la taquiner à propos de ce que Sirius venait de lui dire.
Je te regarde t’amuser et je fais semblant,
Mais je ne peux pas t’empêcher d’être un enfant
Toi tu fais de grand gestes, tu as l’air si content,
Tu vois, des fois je déteste ce que je ressens Bientôt, un nouveau groupe d’élèves se joignit à eux et ils se préparèrent à partir. Ceux qui étaient assis se levèrent et ils se rassemblèrent autour des Maraudeurs qui se mirent en route, d’un pas de promenade. Ils n’avançaient pas très vite, et tout en les suivant des yeux, Lily se surprit à rêver au passé et à oublier où elle était.
Elle se souvenait de l’année précédente, de la première fois où James lui avait demandé de sortir avec lui. Elle sortait d’une salle de cours, après les autres car elle était restée pour parler au professeur de quelque chose dont elle ne se souvenait plus : ce qui s’était passé après avait éclipsé tous ses autres souvenirs de cette journée. En passant devant un groupe d’élèves de Gryffondor, elle avait entendu une voix la héler.
« Hé, Evans ! »
C’était James, bien entendu. Elle avait été obligée de s’arrêter, bien qu’elle n’en ait pas très envie car elle l’avait depuis longtemps reconnu, et elle ne tenait pas spécialement à lui parler : déjà à cette époque, elle n’avait pas beaucoup d’estime pour lui et préférait l’éviter, lui et sa conversation inepte et immature. Elle dut pourtant revenir sur ses pas et voir ce qu’il lui voulait. C’est alors qu’il lui avait demandé – sur le ton d’un seigneur généreux qui accorde une faveur à l’un de ses sujets – si par hasard elle ne voudrait pas sortir avec lui.
Cette question l’avait tellement surprise qu’elle n’avait pas pu répondre tout de suite. Aux côtés de James, ses amis attendaient la réponse. Sirius avec un désintéressement parfaitement imité, Peter la fixant, avec dans ses yeux écarquillés une expression presque vorace, Remus l’air plutôt gêné et évitant son regard, et tous les autres avec surtout beaucoup de curiosité. Et la réponse avait fusé sans même qu’elle y réfléchisse.
« Même pas dans tes rêves, Potter ! »
Puis elle avait tourné les talons et était partie sans un seul regard en arrière. Bien plus tard, cette nuit-là, dans son lit, elle avait versé des larmes silencieuses qui avaient brûlé ses joues en coulant et qui lui avaient fait réaliser tout ce que James représentait pour elle. Mais comme par un étrange paradoxe, justement à cause de cela, elle ne supportait pas l’idée qu’il ait pu lui demander ainsi de sortir avec lui, au milieu de tous ces curieux avides de ragots et avec une telle désinvolture. Ce soir-là, elle s’était juré que jamais elle ne deviendrait une de ces adulatrices aveugles et émerveillées qui l’entouraient à chaque seconde. Même s’il fallait pour cela qu’elle souffre plus qu’aucune d’elles ne l’avait jamais fait.
Et elle avait tenu parole.
Il y a trop de gens qui t’aiment,
Et tu ne me vois pas
Je ne sortirai pas indemne
De cet amour avec toi
Il y a trop de gens qui t’aiment,
Qui tournent autour de toi,
Et tous les mots d’amour que je sème
Tu ne les entends pas… Depuis ce jour, il n’avait jamais cessé de la harceler pour qu’elle accepte. Il n’avait jamais digéré la réponse qu’elle lui avait donnée la première fois. Ce devait être, pour lui, une véritable humiliation publique. Aucune autre fille n’avait jamais osé le remettre à sa place de cette manière. Mais il le méritait, pensa Lily.
A présent, ses pensées voguaient vers un autre souvenir, un peu plus récent celui-là. Cela s’était passé exactement un an auparavant, à quelques jours près. Ils venaient de finir les Buses, ils sortaient de la salle d’examen, elle était allée avec ses amies se rafraîchir au bord du lac. C’est alors qu’elle avait vu de loin ce qui se passait entre James, Sirius et Rogue.
Son cœur se souleva de dégoût à cette pensée. Comment quelqu’un pouvait-il se comporter de cette manière ? Elle ferma ses yeux de toutes ses forces et tenta d’effacer la vision qui s’imposait à son esprit. Et de nouveau, la question qu’elle se posait depuis si longtemps revint la hanter. Pourquoi est-ce que je l’aime ? Pourquoi, mais pourquoi ? Il ne le mérite pas.
Mais elle savait qu’elle ne pouvait rien y faire. Elle l’aimait, oui. Et elle ne le regrettait même pas. Elle poussa un long soupir et se força à revenir à la réalité.
« Les choses sont ainsi, songea-t-elle, et ce n’est pas à moi d’y chercher une raison. Il n’y en a peut-être pas. Mais c’est ainsi, et je l’accepte. Qui sait ? Un jour, peut-être… »
Elle savait qu’elle avait tort, mais elle ne pouvait s’empêcher d’espérer malgré tout. Car enfin, James ne pourrait pas rester un enfant toute sa vie. Il finirait par grandir, et alors…
Lily reporta son regard sur le groupe qui s’éloignait en direction de Pré-au-Lard. Un jour, oui, mais quand ? Jusqu’à quand devrait-elle attendre encore ?
Je me sens si loin de toi, à des moments,
Je ne voudrais pas que tu croies que je t’attends
Je me force à espérer mais je me mens
Alors je te regarde t’éloigner tout doucement…[suite au post suivant, ça ne tenait pas en un seul ^^]